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Pourquoi être omnivore

Publié en ligne le 29 juin 2024
Pourquoi être omnivore
Pour votre santé et celle de la planète
Juan Pascual
Edra Media, 2024, 195 pages, 29 €

Le livre du vétérinaire espagnol Juan Pascal était, d’une certaine façon, attendu car on peut s’étonner de ne pas trouver dans les publications actuelles de véritable réponse au fait que notre espèce est omnivore et issue du genre Homo dont les premiers représentants étaient déjà omnivores. Comment comprendre alors ces groupes qui cherchent à imposer aux autres un régime aussi différent de celui auquel notre organisme est adapté depuis tellement longtemps ?

Ce livre y répond de façon étayée malgré une approche quelque peu militante car il fournit, tant pour ce qui est de la réponse sanitaire que de la réponse environnementale, une somme d’excellents matériaux scientifiques dont certains sont peu diffusés. Il dénonce aussi l’instrumentalisation de la science en faveur du végétalisme.

Il est centré sur une réplique argumentée – certes parfois emportée – au véganisme alimentaire 1, c’est-à-dire au végétalisme strict et non point aux situations végétariennes intermédiaires. Celles-ci peuvent constituer sans grand danger le choix respectable des individus, compréhensible en réaction aux excès inverses d’une alimentation trop carnée. Dès lors, l’analyse renvoie à l’antispécisme 2 et, même si le vétérinaire veut en effet contrer des philosophes et des juristes sur un terrain qui n’est pas vraiment le sien, sa démonstration philosophique – et parfois juridique – reste intéressante et utile.

Le plan de l’ouvrage peut apparaître quelque peu décousu et déconcertant. La bibliographie comporte plus de quatre cents références, démontrant l’ampleur du travail effectué, sans que pour autant les articles et ouvrages scientifiques y soient prépondérants.

L’auteur part de la place contemporaine des animaux dans la société, vue de la ville. Il s’intéresse d’abord à la prétention morale supérieure de ce qu’il appelle l’animalisme sans toutefois jamais le définir. On comprend qu’il vise ici l’antispécisme. Il fait observer, en s’appuyant sur des études, que les végans eux-mêmes, en toute petite proportion dans la population, ne sont, selon lui et pour une très large part d’entre eux, jamais longtemps végans, ce que l’on ne dit jamais. Les médias sont souvent dénoncés à cet égard en tant que manipulateurs de l’opinion publique. Certains intérêts financiers sous-jacents, notamment dans la « Silicon Valley », sont pointés du doigt, de même que les dérives sectaires et parfois violentes du mouvement qui sont évoquées dans le livre.

Une partie importante de ce dernier est consacrée à la domestication, versus la vie sauvage, avec l’étude des conséquences de l’élevage pour les animaux et un long développement relatif au bien-être animal. Mais sa seconde partie argumentative sur « l’animalisme » apparaît comme la plus fournie, elle-même divisée en quatre chapitres d’inégale importance : l’élevage, refusé pour des raisons morales autour de la mort, de la douleur, de la souffrance et les conséquences d’un monde antispéciste ; l’élevage refusé au nom de l’environnement ; l’élevage refusé au nom de la santé humaine ; dans tous les cas argument contre argument ; enfin, pour être complet, un court chapitre, assez peu étoffé, sur le végétalisme et les religions.

L’auteur, après ce large brassage de faits et d’idées, conclut sur le refus des solutions sans justifications étayées et cherche à montrer que l’absence de produits d’origine animale dans nos assiettes ne contribuerait en réalité ni au bien-être animal, ni à notre santé ni à notre environnement.

1 Le véganisme alimentaire refuse toute alimentation d’origine animale (y compris les œufs, le miel et les produits laitiers).

2 D’après le Larousse : l’antispécisme est une vision du monde qui récuse la notion de hiérarchie entre les espèces animales et, particulièrement, la supériorité de l’être humain sur les animaux. (Accordant à tous les individus, indépendamment de l’espèce à laquelle ils appartiennent, un même statut moral, l’antispécisme combat toutes les formes de maltraitance et d’exploitation animales.)