Hold Up : le documentaire complotiste à succès sur la pandémie de Covid-19

Le film Hold-Up sorti en 2020 se veut un documentaire sur la gestion sanitaire et politique de la pandémie de Covid-19 en France particulièrement, mais aussi à l’échelle mondiale. Réalisé par Pierre Barnérias, journaliste passé par la presse écrite et télévisée, il traite des controverses autour de l’utilité des masques, du confinement, des traitements expérimentés puis reprend la théorie du complot d’une supposée création du virus visant à réduire la population mondiale et asservir les survivants. Le film a été diffusé sur la plateforme Viméo avant d’être déprogrammé. Il a ensuite circulé de façon virale sur les réseaux sociaux et a grandement participé à la désinformation sur la pandémie de Covid-19, malgré les nombreuses critiques des scientifiques (dont un appel conjoint des Académies de médecine, de science, de pharmacie et des technologies [1]). Hold Up a été un grand succès populaire et financier.

Qu’est-ce qui, dans ce film, relève de la quête d’informations objectives ou de la manipulation ? La réponse se trouve dans les déclarations mêmes de Pierre Barnérias au cours d’interviews sur France 2 [2] et W9 [3]. À l’animatrice qui lui demande sur W9 pourquoi il n’y a pas de parole contradictoire aux prétendus experts qui s’expriment, il répond : c’était volontaire, j’avais un point de vue, réhabiliter le virus. Ou encore : dans ce film je propose un autre regard sur la gestion de cette crise. C’est un regard cinématographique, j’ai essayé de chercher, de capter, d’avoir de l’émotion et j’ai cherché surtout à avoir une parole différente de celle que l’on entendait jusqu’à maintenant.

La méthode Barnérias repose sur plusieurs outils de manipulation. Il prétend à l’objectivité et affirme ouvrir un débat, mais il choisit une thèse, établit une narration et sélectionne des propos n’allant que dans ce sens. Il fait intervenir des personnes présentées comme expertes, ayant une parole dissidente, mais sans contradiction aucune, et jouant sur la dissimulation d’information et sur le mystère. Quand l’animatrice sur W9 lui dit : vous dites très clairement dans votre film que le virus du Sars-Cov 2 a été créé par l’institut Pasteur, il répond : moi je ne dis rien, se retranchant derrière son statut d’artiste. Sous-entendu, ce sont les scientifiques qui se sont exprimés. Le rôle du journaliste n’est-il pas de s’assurer du bien-fondé des propos qu’il rapporte ? Il assume avoir fait un film à thèse et quand on lui reproche son manque d’impartialité, il balaie d’un revers de main les critiques qui lui sont adressées. Le succès de ce qui apparaît comme un documentaire trompeur ou mensonger repose surtout sur ce filon : nourrir les spectateurs peu informés avec de nombreux éléments accréditant la thèse de complots sensationnels et faisant croire à l’existence d’un mouvement citoyen cherchant à s’y opposer. Il utilise d’ailleurs cette notion de film citoyen dans plusieurs de ses réalisations. Le tout fonctionne à l’émotion, entraînant une adhésion rapide d’un grand nombre de spectateurs.

Au fond, il fait du Dan Brown avec le Da Vinci Code ¹, sauf que ce dernier a écrit une fiction et non un documentaire ! Cela s’appelle la méthode complotiste.