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La cellule : un centre-ville à l’heure de pointe

Publié en ligne le 21 octobre 2005 -
par Pascal Lapointe - ASP

C’est déjà assez compliqué de comprendre comment nos gènes communiquent entre eux. Voilà qu’il faut aussi découvrir comment ils réussissent à se comprendre : car l’intérieur de chacune de nos cellules constitue un environnement qui, à son échelle, est aussi bruyant qu’un centre-ville à l’heure de pointe !

Tel est en effet le bizarre portrait tracé peu à peu par les généticiens. Un portrait où les « messages », sous la forme de signaux chimiques, passent en cascade d’un point à un autre. Des messages qui sont capitaux pour le bon fonctionnement de notre organisme, et que les scientifiques commencent à peine à distinguer du « bruit de fond ».

Deux équipes présentent à ce sujet deux études dans l’édition du 25 mars 2005 de la revue américaine Science.

L’une d’elles s’attarde à ce que ses auteurs, dont Peter S. Swain, du Centre des dynamiques non-linéaires de l’Université McGill, appellent la fonction de régulation des gènes. Une fonction liée notamment au taux de production de protéines par ces gènes. Et une fonction qui fluctue à un rythme que les auteurs ont tenté de mesurer — puisque le rythme de ces fluctuations peut lui aussi affecter les « opérations » des gènes.

Résumons. Il faut donc évaluer le taux de production des protéines — ce que ces chercheurs, incluant deux biologistes israéliens de l’Institut Weizmann des sciences et deux biologistes américains du Caltech, ont fait avec un gène marqueur chez la bactérie E. coli — et mesurer ensuite leurs fluctuations par rapport aux fluctuations inhérentes aux cycles de la cellule elle-même (environ 45 minutes).

Parallèlement, dans l’autre recherche publiée par Science, leurs collègues se sont intéressés à « la propagation du bruit », autrement dit le bruit de fond, au sein de ces protéines.

Où tout cela nous conduit-il ? À la possibilité « de créer des réseaux génétiques synthétiques plus complexes », résument Farren J. Isaacs, du département de génétique de l’Université Harvard, et ses collègues, dans une analyse qui complète ces deux études. De tels réseaux pourraient en théorie être fabriqués sur mesure pour filtrer les « bruits de fond » ou au contraire amplifier ceux dont on aurait besoin : on pourrait ainsi exploiter la fonction d’un gène qui, en produisant plus ou moins de la protéine souhaitée, conduit la cellule à se comporter de la façon dont on souhaite qu’elle se comporte.

On en est encore loin. Pour l’instant, il faut continuer d’écouter ce centre-ville à l’heure de pointe — et en distinguer, un par un, les sons qui nous parviennent, leurs origines et leurs cycles.


Mots-clés : Biotechnologies - SVT


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